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Vidéo à la demande et chronologie des médias

La Vidéo à la demande, en anglais Video on demand (VOD), est une technique qui permet à l’utilisateur de visionner une vidéo de son choix (film, documentaire, émission…) sur demande, au moment de son choix, par un moyen de télécommunication (Internet, télévision hertzienne, satellite, câble…). Plusieurs techniques existent pour transférer la vidéo, mais les deux plus courantes sont le streaming et le téléchargement. En streaming, la vidéo n’est gardée que le temps de la lecture, alors que le téléchargement permet de garder la vidéo sur le disque dur de l’ordinateur.

Apparue à la fin des années 1990, cette technique s’est rapidement développée aux États-Unis, mais n’est réellement arrivée en France qu’en 2005. L’offre, d’abord très restreinte, tend à se diversifier depuis quelques mois, notamment avec l’apparition des séries sur les plates-formes de VOD. Aujourd’hui, la France est le pays européen qui dispose du plus de services de VOD, que ce soit par Internet ou par télévision sur IP (système de télévision utilisé dans les offres de triple-play).

Cette offre légale d’œuvres en ligne n’est cependant pas aussi développée que le voudraient les ayants droit, en raison de plusieurs obstacles :

  • la chronologie des médias ;
  • les DRM (mesures techniques de protection/verrous numériques) ;
  • les modèles économiques peu attractifs.

Les DRM et les modèles économiques seront étudiés dans un article ultérieur.

     LA VOD DANS LA CHRONOLOGIE DES MÉDIAS

La VOD a dès le départ posé la question de son insertion dans la chronologie des médias. Les premières réponses sont apparues en 2004, quand les acteurs de l’industrie du cinéma ont posé les jalons de l’offre légale de films sur Internet, afin de lutter contre le piratage. A l’époque, l’industrie envisageait de fixer le délai d’insertion de la VOD dans la chronologie des médias à douze mois, et neuf pour les films n’ayant eu que peu de succès en salle. Les fournisseurs d’accès à Internet voulaient par contre déjà ramener ce délai à six mois (comme aux Etats-Unis), mais les éditeurs de DVD avaient trop peur de la concurrence des deux médias.

La VOD a finalement été insérée dans la chronologie des médias par le Protocole d’accord interprofessionnel sur le cinéma à la demande, signé le 20 décembre 2005. Le délai prévu était de 33 semaines, c’est-à-dire sept mois et demi après la sortie du film dans les salles françaises, entre la vidéo (location et vente) et le Pay-per-view. Mais cette nouvelle fenêtre n’est pas définitive comme la plupart des autres délais de la chronologie des médias : la fenêtre peut être suspendue par voie contractuelle au profit des chaînes de télévision coproductrices de l’œuvre cinématographique, pendant leur fenêtre de télédiffusion. 

Le Protocole d’accord interprofessionnel sur le cinéma à la demande avait été conclu pour 12 mois le 20 décembre 2005, mais n’a pas été renouvelé. En décembre 2006, lors de la renégociation de l’accord, une mésentente est née entre les FAI et certains professionnels du cinéma signataires. En effet, ces derniers ont milité en faveur de l’alignement du délai pour la VOD sur celui prévu pour la location ou la vente de supports vidéographiques, c’est-à-dire 6 mois. Le 23 novembre 2007, les « accords de l’Elysée », signés par les FAI, les producteurs de films et les pouvoirs publics, ont été adoptés. Le texte préconise que le délai pour la fenêtre VOD soit ramené à 6 mois, puis à nouveau diminué. Néanmoins, la portée de ces accords est incertaine. Depuis, la chronologie des médias concernant la VOD est négociée au cas par cas. Mais en pratique, l’accord de 2005 est encore respecté actuellement.

En 2008, le CNC a annoncé de nouvelles négociations pour adopter un nouvel accord concernant la VOD. Cependant, elles ont été repoussées en septembre 2008 et aucune nouvelle date n’a été annoncée.

     SEPT MOIS ET DEMI  : UN DÉLAI TROP LONG

Aujourd’hui, en France, le but premier de la chronologie des médias est de protéger les investissements de chaînes de télévision qui aident à financer le cinéma. En effet, le cinéma est financé par l’État, les chaînes payantes et gratuites, ainsi que par d’autres sources moins conséquentes. La chronologie des médias permet à ces chaînes de bénéficier d’une fenêtre d’exploitation exclusive, pour récupérer l’argent qu’elles ont investi. Les chaînes de télévision voient donc d’un mauvais œil que leurs chaînes soient concurrencées par la VOD. Une telle concurrence les pousserait à diminuer leurs investissements dans le cinéma, en conséquence de leur perte de revenus.

La chronologie des médias permet en fait une « exploitation séquentielle », où le spectateur paye à chaque niveau. Mais actuellement, le piratage d’œuvres audiovisuelles remet en cause ce système. Pour les films, cela se voit à plusieurs niveaux :

  • les sorties simultanées en salles dans le monde entier n’étant pas généralisées à tous les films, les films étrangers sont donc très souvent piratés et disponibles sur les réseaux avant même leur sortie en France. L’un des meilleurs exemples avait été la sortie de Star Wars Episode 1, sorti aux USA le 19 mai 1999, et en France le 13 octobre 1999. Heureusement, les producteurs semblent avoir compris la leçon, et les films les plus attendus sortent aujourd’hui dans le monde entier en l’espace de deux semaines (ex : les films de Harry Potter). Malheureusement, certains films attendent encore plus d’un mois avant de sortir sur nos écrans, comme Hellboy II (sorti le 11 juillet 2008 aux USA, et prévu pour le 29 octobre en France) ;
  • les DvdRip (copie de bonne qualité provenant d’un DVD) sont toujours disponibles sur les réseaux avant la sortie française du DVD. Ces copies viennent souvent de Russie (elles sont alors appelées R5), ou des USA, où les DVD NTSC sortent bien plus tôt que chez nous (environ 3 mois après la sortie en salles). Le délai de 6 mois des DVD n’est plus justifié. Aujourd’hui, la plupart des films restent à peine trois semaines à l’affiche des cinémas, malgré de longues campagnes promotionnelles. Pendant la période située entre la fin de l’exploitation en salles et la sortie en DVD, il s’écoule donc environ 5 mois où le spectateur, toujours sous l’influence de la campagne de promotion, ne peut avoir accès au film qu’en le téléchargeant illégalement…

Une fois le DVD sorti en France, il faut encore attendre un mois et demi avant l’arrivée du film en VOD, pour protéger la location et la vente de DVD. Pourtant, l’idée de diffuser les films en VOD plus tôt, comme le demandent les Fournisseurs d’Accès à Internet, ne semble pas mauvaise, surtout pour lutter contre la contrefaçon numérique. Depuis 2008, la Warner a raccourci le délai de diffusion de ses films en VOD, qui sortent désormais aux États-Unis le même jour qu’en DVD. Les autres acteurs du cinéma américain semblent ensuite suivre la tendance, car cela n’a pas d’effet négatif sur les ventes et locations de DVD. Selon le NPA Conseil, cette mesure augmente même les achats de VOD et de DVD, et n’affecte que très peu la location (-2%).

Il serait opportun de :

  • raccourcir le délai à 4 mois maximum, afin de développer le marché. En effet, raccourcir la chronologie des médias permettrait aux différents modes de diffusion de profiter des opérations de promotion mises en place au moment de la sortie cinéma, et ainsi maximiser la rentabilisation du film. Une telle mesure se justifie surtout par le fait que l’offre actuelle de films est très abondante, et la fin de la campagne de marketing accompagnant la sortie signifie souvent son oubli par les spectateurs ;

  • ne pas fermer la fenêtre de la VOD pendant la télédiffusion, car cela réduit considérablement la période de disponibilité en VOD du film. Il ne semble pas opportun de privilégier l’exclusivité de certaines chaînes de télévision au détriment de la VOD, alors que les deux moyens de diffusion sont suffisamment différents pour ne pas être réellement concurrents.

*

Aujourd’hui, la VOD ne doit plus être vue comme un modèle concurrent des autres moyens de diffusion d’œuvres audiovisuelles, mais comme un choix alternatif pour le consommateur. L’heure n’étant plus au règne de la télévision préprogrammée, mais à la liberté de regarder ce que l’on veut quand on le veut, il semble plus intéressant de lui laisser le choix du moyen de diffusion, plutôt que de le contraindre à patienter pendant un délai déterminé avant de pouvoir utiliser son support de prédilection.  

La modification de la chronologie des médias semble indispensable pour accompagner la lutte active contre la contrefaçon numérique. CoPeerRight Agency recommande donc de réduire au maximum les délais précédant la diffusion d’un film en VOD, afin d’adapter l’offre légale à la « chronologie de la contrefaçon numérique ».

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