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Projet de loi « Création et Internet » : les travaux de CoPeerRight Agency

CoPeerRight Agency anticipe la mise en application de la future loi « Création et Internet » et fait part de ses préconisations.

En tant qu’acteur majeur de la lutte contre la contrefaçon numérique, CoPeerRight Agency souhaite participer activement à la cause défendue actuellement par le gouvernement. La « Riposte Graduée » repose sur un principe de prévention que nous partageons et c’est pourquoi nous sommes convaincus de son potentiel. En revanche, l’application même de ce mécanisme pourrait se confronter à des obstacles techniques et juridiques. CoPeerRight Agency met au jour les limites possibles de la « Riposte Graduée » et propose des solutions pour optimiser son efficacité. Ces préconisations ont été exposées au sénateur Michel Thiollière et à certains de ses conseillers il y a quelques semaines. Certaines d’entre elles semblent d’ailleurs avoir été prises en compte parmi les 50 amendements déposés sur le projet de loi le 23 octobre 2008.

LES SANCTIONS ALTERNATIVES À LA SUSPENSION DE L’ACCÈÀ INTERNET

Nous pensons que la suspension de l’accès à Internet est une sanction particulièrement lourde par rapport à l’acte de contrefaçon. En effet, celle-ci pénalise tous les utilisateurs de la connexion à Internet, y compris la famille de l’abonné, alors qu’Internet est aujourd’hui un média incontournable. Par exemple, en cas de sanction, comment procèderont les internautes qui effectuent leur déclaration d’impôts en ligne ?

Par ailleurs, il semble qu’il ne soit pas encore possible pour les FAI de ne couper que la connexion Internet dans les offres « triple-play » non dégroupées (qui incluent également la téléphonie et la télévision par Internet). Cette limite a été soulignée par l’ARCEP dans un rapport remis au gouvernement et par le président de l’AFA. Les abonnés à ce type d’offres pourraient donc échapper à la suspension de leur connexion Internet, ce qui créerait une inégalité entre les internautes. D’autre part, la suspension de l’abonnement à Internet pourrait considérablement affecter certains indépendants ou encore certains professionnels libéraux qui utilisent leur abonnement à des fins à la fois personnelles et professionnelles.

Il faut encore noter que la suspension de l’accès à Internet contredit un des objectifs centraux des Accords de l’Elysée : le développement de l’offre légale. En effet, en privant temporairement l’abonné de sa connexion, c’est aussi l’accès aux services de VOD ou de téléchargement légal qui lui serait fermé.

D’un autre côté, il est certain que la contrefaçon numérique ne doit pas se développer en toute impunité. C’est pourquoi des alternatives à cette suspension peuvent être envisagées : la limitation de l’accès à Internet ou des services Internet et la proposition d’une transaction amiable.

La limitation de l’accès ou la limitation des services

La limitation de l’accès consisterait à appliquer un bridage sur la quantité de données pouvant être reçues ou émises afin de ralentir fortement la capacité de téléchargement ou de partage de données numériques.

La limitation des services consisterait à autoriser uniquement l’accès à certaines ressources comme le mail, la téléphonie, la télévision, la navigation Web etc.

L’adoption conjointe de ces solutions permettrait de limiter la contrefaçon numérique par l’internaute, tout en permettant l’accès aux services d’Internet (éducation, banque, courrier, administration, emplois…).

La proposition d’une transaction amiable

Le projet de loi prévoit un système de transaction afin de réduire la durée de la suspension de l’accès à Internet de 1 à 3 mois (au lieu de 3 à 12 mois), en fonction de la gravité du manquement. Cette proposition peut être faite à l’abonné mais le projet de loi ne précise pas les conditions d’application de cette offre : dépendra-t-elle du nombre d’œuvres téléchargées ? Ou bien de la qualité de l’internaute en faute (premier diffuseur, simple téléchargeur ou gros diffuseur) ?

Nous conseillons donc de proposer une transaction amiable dissuasive et bénéfique pour les ayants droit. A cette fin, nous pensons que les ayants droit et les internautes contrefacteurs pourraient se mettre d’accord sur le montant d’une somme forfaitaire dont le paiement permettrait d’éviter la suspension de l’abonnement. Concrètement, cette compensation financière de l’internaute serait raisonnable mais tout de même supérieure au prix de l’offre légale. Cette solution bénéficierait donc d’un double avantage :

  • ce paiement serait plus dissuasif pour les téléchargeurs ;
  • ce paiement permettrait de compenser le préjudice subi par les ayants droit.

Fin 2004, CoPeerRight Agency avait déjà soumis l’idée, lors d’une assemblée générale des membres du SELL, de proposer une transaction à l’amiable aux internautes identifiés comme téléchargeant ou mettant à disposition des jeux vidéo, afin de leur éviter les sanctions pénales. Cependant, cette proposition n’a jamais pu aboutir puisque les FAI, comme aujourd’hui, ne sont pas habilités à traiter les adresses IP de leurs clients dans le cadre d’une infraction afin de leur envoyer des messages.

LA SAISINE DE L’HADOPI OUVERTE À TOUS LES AYANTS DROIT

Parmi les amendements proposés, l’un d’entre eux suggère d’étendre la saisine de l’HADOPI aux éditeurs de logiciels et entreprises de communication audiovisuelle. CoPeerRight Agency soutient cette idée et souhaite aller encore plus loin en facilitant la saisine de l’HADOPI par tous les ayants droit, y compris ceux non représentés par des sociétés de gestion collective ou des organismes de défense professionnelle (les artistes indépendants, les éditeurs de BD, les éditeurs de films pour adultes…). Il est en effet important que tous les ayants droit soient traités de façon égalitaire et puissent bénéficier du même niveau de protection de leurs œuvres.

LE FILTRAGE DU CONTENANT

Le projet de loi « Création et Internet », tel qu’il a été présenté au Conseil des ministres le 18 juin dernier, donne la possibilité aux ayants droit de solliciter du juge judiciaire des mesures de filtrage des contenus. A l’heure actuelle, ce procédé, mis en place à grande échelle, pourrait engendrer des coûts importants pour une efficacité incertaine. Il faut enfin noter qu’une majorité de fichiers contrefaits sont aujourd’hui mis à disposition à travers des sites dont les serveurs se situent à l’étranger (Maroc, Tunisie, Ukraine…). Or il n’y a aucun moyen de contraindre des FAI ou des serveurs de streaming étrangers à mettre en place de telles mesures de filtrage.

CoPeerRight Agency préconise le filtrage du contenant (URL, IP) afin de limiter les téléchargements illégaux sur la toile. Sur le plan technique, cette solution, déjà utilisée, bénéficie d’une grande efficacité pour un coût faible. Par ailleurs, elle est plus respectueuse de la vie privée des internautes. Enfin, cette technique ne concerne pas seulement le P2P, mais tous les modes de contrefaçon existants et à venir (sites de streaming, de DDL, newsgroups…).

L’UTILISATION DE HASHS CRYPTOGRAPHIQUES

Pour identifier et suivre les fichiers contrefaits, deux solutions sont envisageables : le fingerprinting et le hachage cryptographique que CoPeerRight Agency préconise tout particulièrement. Les hashs cryptographiques sont générés par des algorithmes de hachage cryptographiques qui permettent de ressortir d’un fichier une valeur unique (Md4, Md5, SHA1, Tiger Tree…). Cette technologie, déjà utilisée dans le monde entier, comporte de nombreux avantages :

  • rapport coût/efficacité très intéressant : retour sur investissement avantageux et rapide (algorithmes sous licence open source, calcul automatique par les logiciels P2P…) ;
  • applicabilité à tout format de fichiers contrefaits numériques : musique, vidéo, logiciels, fichiers archivés, multilingues etc. ;
  • rétrocompatibilité et interopérabilité : le hash peut être exploité de façon illimitée dans le temps et la cohabitation est possible au sein d’une même plate-forme de référence ;
  • très forte fiabilité : les risques de collision sont très faibles (deux fichiers différents ne peuvent pas avoir un hash identique) ;
  • accès facile pour tous les ayants droit ;
  • possibilité de créer une base de référence internationale que tout ayant droit pourrait alimenter, sans faire appel à un prestataire.

L’ENVOI DE MESSAGES PRÉVENTIFS VIA LES LOGICIELS P2P

Dans le cadre de la phase préventive de la « Riposte Graduée », le projet de loi prévoit l’envoi d’un ou plusieurs messages de prévention au titulaire de l’abonnement à Internet responsable d’un acte contrefaisant commis via sa ligne. Ces messages appelés recommandations seront envoyés sur la messagerie électronique de l’abonné fournie automatiquement par son FAI. Mais peu de gens consultent cette messagerie. N’y a-t-il donc pas un risque que le message échappe à la connaissance de son destinataire ?

Pour cette raison, nous préconisons d’envoyer des messages préventifs via les fonctionnalités de communication intégrées aux programmes P2P, lorsque c’est techniquement possible, en parallèle des recommandations envoyées par les FAI. En plus de préserver l’anonymat de l’internaute, ce procédé a l’avantage de cibler directement la personne responsable de l’acte de contrefaçon détecté. Ce système original d’envoi de messages s’inscrit déjà dans la démarche préventive de CoPeerRight Agency depuis sa création. Cette technologie a été retenue en 2005 par le SELL (Syndicat des Editeurs des Logiciels de Loisirs) et ce dernier a obtenu une autorisation de la CNIL le 24 mars 2005 pour mettre en œuvre ce dispositif en France. A l’heure actuelle, CoPeerRight Agency procède à l’envoi de messages de prévention depuis le territoire canadien. Cette méthode garantit des résultats probants : un indice de disparité a pu être constaté dès lors qu’un internaute reçoit le message via son programme P2P. En 2005, Jean-Claude Larue, délégué général du SELL, s’exprimait sur l’efficacité des messages de sensibilisation en ces termes : « Nous savons que nos campagnes d’avertissement sont efficaces. Quand on commence à envoyer nos messages, nous constatons que le taux de piratage sur un titre baisse de manière très significative ».

LA FOCALISATION DE LA RÉPRESSION SUR LES PRIMO-DIFFUSEURS

La « Riposte Graduée » vise le titulaire de l’abonnement. Or il n’est pas nécessairement l’auteur des actes de contrefaçon qui ont été commis. De plus, s’il est sanctionné, la suspension de l’accès à Internet s’accompagne d’une interdiction pour le propriétaire de la ligne de contracter un nouvel abonnement. Mais rien n’empêche certains de ses proches de le faire (par exemple : son concubin, ses enfants…).

CoPeerRight Agency préconise donc de sanctionner les primo-diffuseurs. Puisqu’ils sont à l’origine de la diffusion illégale des œuvres, CoPeerRight Agency estime qu’ils doivent être poursuivis en priorité. Nous pensons qu’il est préférable d’agir à la source : en dissuadant les primo-diffuseurs de mettre à disposition des fichiers illicites à télécharger sur les réseaux P2P, la contrefaçon numérique serait considérablement limitée.

LA CERTIFICATION DES OUTILS PAR L’HADOPI

Plusieurs outils vont être nécessaires à la mise en pratique du projet de loi : outils de repérage des internautes, outils de filtrage, outils permettant d’envoyer les recommandations, outils de sécurisation des connexions Internet etc. Il est donc nécessaire que leur fiabilité et leur efficacité soient garanties. Sans cela, n’y aurait-il pas un risque par exemple que des fichiers légaux (fichiers leurres, bandes annonces, démos de jeux vidéo…) soient détectés comme des fichiers contrefaits ?

A titre d’exemple, le site The Pirate Bay a décidé de placer dans ses trackers des « paquets entiers d’adresses IP prises au hasard ». Cette stratégie oblige les prestataires chargés du repérage à initier le téléchargement pour vérifier que l’adresse IP repérée effectue bien des téléchargements.

On peut également citer le cas récent du couple écossais d’un certain âge (54 et 66 ans), accusé par un éditeur de logiciel d’avoir partagé illégalement un jeu de courses automobiles : victime d’une usurpation d’IP ?

Dans le cadre du projet de loi « Création et Internet », il serait donc nécessaire que l’HADOPI réalise des tests et analyse les résultats dans le but de certifier ou labelliser les technologies utilisées. Pour cela, une autorité administrative indépendante (par exemple l’HADOPI) pourrait déterminer un cahier des charges, publier ses critères et évaluer les technologies des prestataires. Cela permettrait notamment de rendre l’HADOPI « irréprochable et efficace », comme le rapport rendu par Michel Thiollière le suggère.

LES AUTRES PISTES À ETUDIER

CoPeerRight Agency a travaillé sur d’autres idées :

  • apporter des garanties pour l’égalité de traitement. Il serait souhaitable que le législateur apporte des garanties pour l’égalité de traitement quant à l’identité des personnes appréhendées par l’HADOPI. En effet, il est important que chaque abonné soit traité de la même façon ;
  • diminuer le nombre d’intermédiaires concernés par le traitement des adresses IP. Actuellement, plusieurs entités seraient amenées à traiter les adresses IP des internautes repérés : les prestataires techniques, les sociétés de gestion collective et les organismes de défense professionnelle ainsi que leurs agents assermentés, puis l’HADOPI et enfin les FAI ;
  • anticiper et réglementer l’usage des logiciels P2P cryptés. Afin d’anticiper la lutte contre la contrefaçon commise par le biais de logiciels P2P cryptés, pourquoi ne pas prévoir dans la loi une interdiction d’utiliser des logiciels P2P à fort cryptage ?
  • améliorer l’offre légale. Il serait notamment souhaitable que l’offre légale s’adapte davantage à la « chronologie de la contrefaçon numérique »,  plutôt qu’à l’actuelle « chronologie des médias ». En effet, nous constatons que les versions DVD d’un film (DVDR5, DVDR9…) sont disponibles sur les réseaux environ quatre à six semaines après la sortie salle en France ;
  • organiser la lutte contre la contrefaçon numérique au niveau européen. Puisque ce phénomène ne connaît pas de frontières, il est nécessaire que les Etats harmonisent leur législation, afin de se doter d’actions communes et similaires à l’échelle européenne.
  • on peut aussi se demander s’il ne faudrait pas prendre en compte l’âge de l’internaute qui a commis la contrefaçon. Dans ce sens, pourquoi ne pas envisager d’adapter le dispositif pour les internautes mineurs ?

En tant que force de conseil et de proposition, CoPeerRight Agency souhaite attirer l’attention des pouvoirs publics sur les solutions qui existent et qui pourraient contribuer à optimiser l’efficacité du projet de loi « Création et Internet ».

Le projet de loi « Création et Internet », tel qu’il a été présenté au Conseil des ministres le 18 juin dernier, donne la possibilité aux ayants droit de solliciter du juge judiciaire des mesures de filtrage des contenus. A l’heure actuelle, ce procédé, mis en place à grande échelle, pourrait engendrer des coûts

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